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Georges Thomas COLLINS

L’expulsion du paradis


 

Carton :

« Carte complémentaire d’une carte principale, figurant sur la même feuille et souvent établie à une échelle différente. »

Je veux mettre en valeur le cercle de lumière apparue dans le jardin de Bagatelle, le cercle d’enchantements et de privilèges qui avaient baignés l’être d’Adam et Eve. C’est un des ovales du peintre. Une des plus importantes ; un de ceux qui épingle le plus d’émotion. 

Au commencement, l’émotion.

Le périmètre de lumière dans le jardin de Bagatelle est une réussite . Rien d’autre n’est nécessaire que cette lumière, cet angle de vision qui fait que la lumière soit là , au milieu du jardin d’aujourd’hui ; Comme si il suffisait d’un rien- d’un cliché ou d’une métaphore- pour que tout soit de nouveau là avec nous, le plus ancien et le plus récent, le plus terrible et le plus apaisant. Question de doigté, question de chance, question pour tous les artistes.

Cette expulsion à eu lieu. Les jardins sont là pour nous le remettre définitivement en mémoire . en arrière de nous et en avant ; Ni un age d’or définitivement perdu, ni une molle promesse pour après la mort . les jardins sont des régimes de présentification du bonheur qui cartonnent dans nos cœur, c’est un secret de polichinelle ! On est si bien dans les jardins et les parcs ! L’expulsion beaucoup moins .c’est le fil à couper le beurre, le moment du jugement : l’humanité dans le paysage, possible ou impossible ? Maintenant ou demain ? Désirable ou hallucinatoire ? Voila le seul jugement dernier. 

J’ai l’impression que je pourrai vivre une vie entière sous ce tableau . le cercle de lumière est une trouvaille ; et ces corps d’homme et de femme sont dessinés à la perfection. C’est tout de même étrange qu’il retrouve cette scène une fois récupéré ses moyens de peintre, une fois réinscrit dans le cercle des initiés des techniques de la peinture. C’est moins un ovale pour les croyants, qu’un ovale pour les nouvelles générations. Ca donnerait peutêtre envie de revenir au livre de la Génèse, autrement que les disputes entre créationistes et athées. Cette lumière que le couple doit quitter est géante !

J’installe l’ovale sur un mur, et je branche un MP3 pour réentendre la voix de ma bien aimée lisant cette prose évangélique d’Arthur Rimbaud. Je la re branche ici , pour vous rappeler qu’il faut être preste par moments et tranquilles à d’autre , selon ce que l’instant exige :

« Il y avait un jour de février, mars ou avril, ou le soleil de deux heures après- midi, laissait s’étaler une grande faux de lumière sur l’eau ensevelie, et comme la bas, loin derrière les infirmes, j’aurais pu voir tout ce que ce rayon seul éveillait de bourgeons et de cristaux et de vers, dans le reflet, pareil à un ange blanc couchés sur le coté, tous les reflets infiniment pales remuaient. Alors tous les péchés, fils légers et tenaces du démon, qui, pour les cœurs sensibles rendaient ces hommes plus effrayants que les monstres, voulaient se jeter à cette eau. Les infirmes descendaient, ne raillant plus ; mais avec envie. »

Il est temps de juger cette vignette. Je me retrouve sur une navette émotionnelle qui va à toute vitesse du jardin de Bagatelle à la piscine de Beth Saïda, et la lumière est la même, et les humains sont pitoyables et on a pitié pour eux. C’est un moment : il faut agir vite , et les infirmes se précipitent, comme si on pouvait renverser le jugement d’Eden. C’est la voix d’hélène que j’entends en regardant cette peinture ovale, et quand elle récite, cette prose écrite sur l’autre face d’une saison en enfer, alors je me dis que par moments le paradis est maintenant, à l’instant, sans conteste.


 

The ultimate challenge

Le plus difficile et le plus passionnant, serait de pouvoir reproduire en mots ce qui se passe sur la toile au moments de tâtonnements et des premières touches de couleurs ; Difficile ici de ne viser autre chose qu’une fiction sérieuse ;

Aucun doute que c’est un travail de mémoire, sur la mémoire, un pari que la mémoire sera au rendez vous, et qu’elle ne jouera pas trop au chat et à la souris.

« Qui aurait trouvé le secret de se réjouir du bien, sans se fâcher du mal contraire, aurait trouvé le point : c’est le mouvement perpétuel . »

Pascal

Quand je regarde le visage de l’ange qui retient la main d’Abraham, je pense à cette condition du bonheur, ou plutôt de la joie : « sans se fâcher du mal contraire… »J’entends l’ange dire cela à Abraham : « Tu vas avoir beaucoup de joie encore, mais en attendant il faut que tu travailles l’extraordinaire négativité qui t’a amené ici, avec ton fils. Tu va être écrasés sous la culpabilité, mais je te dis ( et je le tiens de bonne source !) , La vie vous attends !

Il me semble qu’il y a de ça partout dans ta nouvelle peinture. C’est le secret des toile sconsacrées au jardin d’Eden . Exactement comme tu as remonté le temps pour retrouver les secrets de la peinture a tempera, tu as pu revisiter ce jardin en nous le remettant en mémoire comme un exil pénible et tragique ; Je vais chercher les larmes quand je verrai le tableau de près ; Mais aussi, puisque tu es maintenant à la verticale du temps , le jardin peut revenir immaculé , en couleurs, de nouveau innocent comme des fleurs le matin d’un jour de bataille ; Il y a dans ces toiles et dans nos vies beaucoup d’ombres, beaucoup de misère , mais ces ombres sont précisément le matériau des éclats de lumières ! Je voudrais écrire des phrases innombrables exprimant cette pensée, la déclinée de toute les manières possible. La répétition ne donne jamais la même chose : il y a toujours du neuf. Idem pour le jardin d’Eden . Le revisiter c’est écrire un nouveau chapitre pour son étonnante présence parmis nous.

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